Le collier de Marie-Antoinette : un scandale royal
- Faty Cardoso
- 12 mai
- 3 min de lecture

À la fin du XVIIIe siècle, la monarchie française traverse une période de crise financière, politique et sociale. Marie-Antoinette, d'origine autrichienne, épouse du roi Louis XVI, est déjà impopulaire dans une grande partie de l’opinion publique. Elle est perçue comme dépensière, frivole et déconnectée des réalités du peuple. C’est dans ce contexte tendu qu’éclate, en 1785, l’affaire du collier de la reine, un scandale qui ternira encore davantage son image.
Le collier en question est une pièce d'orfèvrerie exceptionnelle, conçue par les joailliers Charles Boehmer et Paul Bassange, sous Louis XV. Il s’agissait d’un somptueux collier de diamants, composé de 647 pierres, d'une valeur colossale (environ 1,6 million de livres à l’époque). Ce bijou avait été initialement destiné à Madame du Barry, la favorite du roi. Mais à la mort de Louis XV, le projet d’achat est abandonné. Après plusieurs tentatives infructueuses pour le vendre, les joailliers cherchent désespérément un acheteur... et c’est là que commence l’escroquerie.
Jeanne de Valois-Saint-Rémy, comtesse de La Motte, une aventurière issue d’une lointaine branche illégitime des Valois, met en place un plan audacieux pour profiter de la situation. Elle se fait passer pour une amie intime de Marie-Antoinette et prétend pouvoir faire acheter le collier par la reine. Elle manipule un homme clé : le cardinal de Rohan, qui cherche à regagner la faveur de la cour. Jeanne le persuade que la reine souhaite acquérir le collier discrètement pour des raisons politiques et que lui, Rohan, pourrait lui faire plaisir en l’achetant en son nom.
Le cardinal, influent mais mal vu de la reine, mord à l’hameçon. Pour le convaincre encore davantage, Jeanne organise une rencontre nocturne dans les jardins de Versailles, avec une fausse reine (en réalité une prostituée ressemblante, Nicole Le Guay d’Oliva). Rohan est convaincu qu’il agit pour la reine en secret. Il signe donc un contrat d’achat du collier en août 1784, que les joailliers remettent à Jeanne… qui s’empresse de le démonter pour revendre les diamants à l’étranger.
L’escroquerie est éventée lorsque Boehmer, sans nouvelles de son paiement, contacte directement la reine, qui découvre alors l’affaire. Elle est furieuse que son nom ait été utilisé, d’autant plus qu’elle n’avait jamais voulu de ce collier.
En août 1785, le roi Louis XVI ordonne l’arrestation publique du cardinal de Rohan, en pleine cour de Versailles. C’est un choc. L’affaire devient publique, passionne l’opinion et tourne au scandale.
Le procès s’ouvre en 1786 devant le Parlement de Paris. L’affaire fait grand bruit. Rohan est finalement acquitté, ce qui est perçu comme une humiliation pour la reine. Jeanne de La Motte est condamnée à la prison et marquée au fer rouge, mais elle s’échappera plus tard.
Marie-Antoinette, bien que totalement innocente dans cette affaire, voit sa réputation irrémédiablement détruite. Elle devient un symbole d’arrogance, de luxe excessif et d’indifférence face à la misère du peuple.
L’affaire du collier n’est pas à l’origine directe de la Révolution française, mais elle a joué un rôle déterminant dans la dégradation de l’image de la monarchie. La reine est moquée dans des pamphlets, surnommée “Madame déficit”. Ce scandale contribue à saper la confiance du peuple dans la monarchie et à alimenter un climat de défiance qui culminera en 1789 avec la Révolution.
L’affaire du collier de la reine Marie-Antoinette est un épisode fascinant, mêlant manipulations, ambitions et illusions, dans un contexte de crise monarchique. Bien qu’innocente, la reine en sortira profondément discréditée, ce qui montre à quel point l’opinion publique de l’époque était déjà révoltée contre l’Ancien Régime. Ce scandale illustre à merveille les profondeurs de l'âme humaine lorsqu'elle se livre à l'envie, à la convoitise et aux pires bassesses de sa nature et comment une affaire apparemment personnelle, peut avoir des répercussions sociales et politiques majeures.
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